Le Duché de Normandie : de protecteur à rival de la France
Publié par France-Trotter le
Le Duché de Normandie : de protecteur à rival de la France
Intro : Le Duché de Normandie, n’a pas toujours été intégré à ce bel hexagone allant de Brest à Strasbourg ou de Dunkerque à Perpignan. Le Royaume de France a longtemps été composé d’un domaine royal, propriété du Roi, et d’une multitude de seigneuries, comtés et autres duchés, plus ou moins vassaux de ce dernier. Cependant, l’autorité royale ne s’exerçait pleinement que sur le domaine. Les vassaux, bien que lié par un serment de fidélité, avaient une certaine liberté, qu’ils s’octroyaient parfois eux-mêmes.
C’est pour ces raisons que de Hugues Capet jusqu’à Louis XV voire Napoléon III, les différents rois voulurent étendre le domaine, jusqu’au frontière qui font la France contemporaine. Cependant, cet agrandissement du domaine royal n’était pas du goût des principaux ducs et duchesses de France qui ont tout fait pour empêcher l’intégration de leurs duchés.
911 : Rollon, le Viking protecteur du Royaume de France
Le Duché de Normandie trouve son origine dans la nécessité de protéger Paris, la capitale du Royaume de France. Lors du VIIIe siècle, les Vikings menèrent de nombreuses attaques et raids contre les villes françaises. Paris, par exemple, fut pris pour cible au moins quatre fois au cours de cette période. Le Roi de France, Charles III, voulut mettre un terme à cette menace en 911. Sa stratégie était de verrouiller l’estuaire de la Seine, la porte d’entrée des navires vikings en direction de Paris. Il décida, alors, d’offrir un large duché autour de Rouen (une ville à visiter) et de l’estuaire au chef Viking Rollon.
L’idée du Roi était d’offrir ce territoire à l’un des leurs, pour calmer leurs ardeurs conquérantes, et limiter les invasions, au nom du respect envers les autres chefs vikings. Ainsi, le Traité de Saint-Clair-Sur-Epte, signé entre les deux parties en 911 acta ces principes. Le Roi offrit à Rollon un territoire autour de Rouen qui correspondrait à l’actuelle Haute-Normandie. En échange, le Duc Rollon devait se faire baptiser et défendre la route maritime vers Paris. Il devait aussi rendre hommage au Roi pour devenir son vassal.
En 924, le nouveau Roi de France, Raoul de Bourgogne fit deux concessions territoriales aux anciens vikings. Le nouveau Duc de Normandie, Guillaume 1er dit Longue Épée, fils de Rollon, reçut du Roi un territoire équivalent aux actuels département du Calvados et de l’Orne. Raoul de Bourgogne lui donna même le territoire de l’actuel département de la Manche, en 933. Le Roi voulait limiter le pouvoir breton sur ces terres et il décida, à cet effet, de les transférer à un autre pouvoir ducal.
1066 : Le début d'une ère anglo-normande
En 1027, à l’arrivée au pouvoir du célèbre Guillaume le Conquérant, à l’âge de 8 ans, la Normandie connut une période d’instabilité d’une dizaine d’années. Les nobles normands voulurent profiter de la jeunesse de leur duc pour faire un peu ce qu’ils voulaient. Vers ses 20 ans, il leva une armée, remit de l’ordre dans le duché, et mata les grands du duché. C’est à cette période que se tissèrent aussi les premiers liens avec l’Angleterre.
Dans les années 1050, le Roi d’Angleterre, Edouard le Confesseur, fit appel au Duc Guillaume pour l’aider dans les luttes internes du royaume. Les actions de Guillaume lui valurent une grande reconnaissance, au point que Edouard désigna Guillaume comme héritier, puisque le Roi n’avait pas de fils. Pourtant, tout ne se passa pas comme prévu. A la mort d’Edouard, en 1066, son beau-frère, se fit finalement couronner Roi. Guillaume n’apprécia guère ce revirement et se lança à la conquête de son bien.
Sans trop entrer dans les détails ici, il y avait trois prétendants au trône qui s’affrontèrent en 1066 en Angleterre. Le Roi de Norvège Harald, qui fut tué au combat par le beau-frère d’Edouard, Harold Goldwinson, le deuxième prétendant. Cependant, celui qui tira son épingle du jeu fut le Duc Guillaume qui gagna la Bataille d’Hastings, lors de laquelle Harold mourut. Guillaume devenait ainsi le seul prétendant en vie et se fit sacré Roi d’Angleterre le 25 Décembre 1066. Son prestige et son pouvoir s’en trouvèrent démultiplier avec l’ajout du Royaume à son domaine personnel. La Normandie devenait, dès lors, une véritable puissance. Par conséquence, cela signait aussi le début de la méfiance française envers un voisin trop puissant.
XIIe siècle : Le difficile maintien de l'union anglo-normande
A la mort de Guillaume le Conquérant en 1087, l’union entre le duché et le royaume était instable. Il les sépara lors de la succession. Son premier fils, Robert, reçut le duché. Son deuxième, Guillaume, reçut le Royaume. Enfin, son cadet Henri, ne reçut rien. Malgré un début d’instabilité dans le duché, le pire était à venir en 1100, quand le Roi Guillaume décéda. Le cadet Henri parvint, alors, à se faire couronner Roi d’Angleterre tandis que le Duc Robert rentrait des croisades. Henri profita, ensuite, des immenses richesses du royaume pour monter une expédition contre son frère en 1105. Ainsi en 1106, après avoir gagné son expédition, Henri 1er réunit à nouveau les deux couronnes.
Cependant, cette accalmie fut de courte durée, puisqu’en 1120 l’héritier du duché décéda. Mathilde, fille du Duc Henri, en devint l’héritière. Cependant, son mariage avec Geoffroy de Plantagenêt, un ennemi des normands, n’améliora pas la stabilité politique. Quand le Duc Henri décéda en 1135, les nobles ne reconnurent pas l’autorité du couple. Ils choisirent comme Roi et Duc, à la place, Etienne de Blois, un autre ancêtre de Guillaume de Conquérant. Geoffroy ne put récupérer le Duché de Normandie que par la force militaire en 1144.
Dès lors, les Plantagenêt n’en restèrent pas là. Geoffroy légua le duché, en 1150, à son fils Henri, futur Henri II de Plantagenêt, pour assurer une stabilité en Normandie. En 1151, Geoffroy décéda et Henri récupéra le territoire familial d’Anjou. Puis, en 1152, Henri II profita du célibat récent d’Aliénor d’Aquitaine (histoire à lire ici) pour se marier avec et récupérer son immense duché. Enfin, il récupéra la couronne d’Angleterre à la mort du Roi Etienne en 1154.
Ainsi, la Normandie devenait le pivot d’un immense territoire Plantagênet en liant le territoire anglais à ceux d’Aquitaine et d’Anjou.
1204 : Phillipe Auguste annexe le Duché de Normandie
A la fin du XIIe siècle, les Rois de France se retrouvèrent avec de puissants voisins anglo-normands qui étaient en même temps leurs vassaux. Les Plantagenêt, bien qu’ils étaient des Rois d’Angleterre indépendants, étaient vassaux du Roi de France pour le Duché de Normandie, le Duché d’Aquitaine et pour les Comtés d’Anjou et du Maine. Face à cette situation, le Roi Philippe Auguste chercha à faire revenir ses territoires dans le giron français.
Philippe Auguste profita du retour tardif du Duc-Roi Richard Cœur de Lion, qui était en Terre-Sainte, pour le faire capturer par le Saint-Empereur, en 1192. Il eut alors le champ libre pour envahir une partie de la Normandie dès 1194. Néanmoins, Richard Cœur de Lion fut libéré cette même année. Par conséquent, la guerre directe commença. Richard sortit militairement vainqueur des combats mais Philippe, habile négociateur, récupéra de nombreux territoires lors du traité de paix.
Richard Cœur de Lion profita de cette paix pour faire construire l’immense forteresse de Château-Gaillard en 1197 et se prémunir de toute invasion du reste de son territoire. Cependant, la paix fut courte. En 1199, Richard Cœur de Lion meurt et Jean sans Terre devint le nouveau Duc-Roi. Il ne fallut qu’un an pour que la situation dégénère, puisqu’en 1200, Jean sans Terre généra sa propre perte. Il décida de se marier à celle qui devait être la future femme de Hugues X de Lusignan, un vassal aquitain. Hugues IX, son père, demanda la justice du Roi de France en tant que seigneur de Jean pour l’Aquitaine. Le procès se conclut par la confiscation des terres françaises de Jean sans Terre.
Pour appliquer ce jugement, l’armée de Phillipe Auguste entra en Normandie en 1202 et finit la conquête en 1204. Les Rois de France possédaient désormais la Normandie dans leur domaine royal.
1417 - 1450 : Le sursaut anglais dans le Duché de Normandie
Cela faisait deux siècles que le Duché de Normandie était solidement ancré au Royaume de France. Pourtant, lorsque la Guerre de Cent Ans fit son apparition en 1337, elle déstabilisa le lien avec le Royaume. Au début de la guerre, la Normandie n’était qu’un champ de bataille secondaire et n’entraîna pas de changement territorial. Cependant, la Normandie acquit un rôle majeur lors de la dernière phase de la guerre. En 1415, le Roi d’Angleterre, Henri V, débarqua en Normandie. Son objectif était clair : récupérer le duché de ses ancêtres. Après de nombreuses batailles, notamment celle d’Azincourt, Henri V se trouva en position de force. Il obtint, ainsi, dans le Traité de Troyes de 1420, la pleine possession du Duché de Normandie (qu’il occupait déjà) et le droit de succession au trône de France.
Les Normands semblaient alors du côté du Roi Henri V et de son fils Henri VI, mais Jeanne d’Arc fit changer le cours de l’Histoire. Son arrivée à Chinon, permit au Dauphin de France, le futur Charles VII, de repasser à l’offensive. Avec elle, en 1429, il libéra Orléans assiégé et il se fit sacrer Roi de France à Reims. Dès lors, l’opinion tourna et les sujets du Roi Henri VI commencèrent à le prendre pour un usurpateur. Malgré la capture de Jeanne en 1430 et sa mort sur le bûcher de la Place au Vieux-Marché de Rouen en 1431, le sort de la guerre ne fut pas enrayé.
Son point d’orgue aura lieu en 1449, lorsque Charles VII et son armée envahirent la Normandie. Il ne leur faudra qu’une année pour atteindre Cherbourg et libérer définitivement le territoire de l’emprise anglaise.
Les principales villes du Duché de Normandie
Retrouvez les principales villes du Duché de Normandie dans mes Cartes aux Trésors. Nous découvrirons ensemble leurs plus beaux monuments. Vous retrouverez aussi ma page dédié à la visite de la Normandie.
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